Politique à Pax-Europa
Politique générale
L’État pax-européen est une vaste machine tentaculaire, infernale pour certains, salvatrice pour d’autres. Il est certain de ses valeurs et actions ont quelque chose de foncièrement ambigu et une certaine dualité, dont il est difficile de distinguer le vrai du faux. La vérité et la calomnie s’entremêlent et les détracteurs aiment se déchainer.
Quand les pays européen et l’UE se sont effondrés au milieu du XXIème siècle, une longue période chaotique s’ensuivit, de laquelle surgirent des hommes et des femmes meurtris, blessés mais toujours influents et surtout motivés à redresser la situation. Unis par la nécessité d’agir, ils s’adressèrent à ce qui restait de gouvernements et… repartirent bredouilles. Qu’à cela ne tienne, ils avaient les moyens de changer les choses avec le soutien des peuples, qui renversèrent leurs démocraties vacillantes pour exiger un pouvoir unique européen pour la construction d’un monde meilleur, plus sûr et stable. C’est ainsi qu’est né le projet utopique de Pax-Europa et grâce à une politique orientée vers une économie forte, innovante et autonome, la gigapole s’est construite sur les deux derniers siècles. Voilà le topo officiel. Aussi surprenant que ça paraisse, il est majoritairement empreint de vérité.
Pax-Europa n’est pas une démocratie et si le visage officiel de ses gouvernants n’est que la Voix, il est de notoriété publique que le pouvoir est partagé par le Conseil des Archontes. De leur identité et de leurs activités, le peuple n’est assurément pas au courant. On imagine beaucoup de choses, surtout des fantasmes, et presque rien n’est vrai.
Au fil des décennies, la politique s’est construite sur quelques valeurs phares : l’eugénisme, l’individualisme, le libéralisme. Le respect des castes établies, la confiance dans le gouvernement, l’amour de son entreprise. Le bonheur est facile d’accès tant qu’on ne se pose pas de questions, la technologie soutient l’Homme et la génétique l’améliore et le mène vers la perfection. Le consumérisme est un bienfait, et l’État providence est le seul capable de protéger la population contre les menaces russes ou orientales. La propagande est bien huilée. Si bien qu’on a pas besoin d’interdire les livres qui pourraient interpeler les gens sur le bienfondé de leur État, car plus personne n’a envie d’en lire. La vérité n’a pas besoin d’être cachée : elle est noyée sous un océan d’insignifiances.
En réalité, et en dehors du Conseil bien peu s’en doutent, Pax-Europa est une oligarchie corporatiste, une ploutocratie à l’équilibre très complexe. Un État totalitaire pour assurer son profit, sa croissance et sa survie, qui promet la pilule de la liberté dans une main mais qui tend celle de l’aliénation de l’autre. Cette dernière est plutôt subtile et démarre dès l’éducation. Les idées sont adoucies par le confort – parfois relatif – et l’omniprésence du high-tech. Si la population n’est pas raciste, on instille la peur de l’étranger – le métèque – dans les esprits, cet étranger qui n’aime pas se plier aux lois de Pax-Europa mais qui vient s’y installer quand même, avec sa nombreuse famille, et ses nombreux microbes. Et dans le même temps, on l’utilise comme main d’œuvre pas chère et illégale, parce que c’est bien pratique. On pointe du doigt les nombreux enfants illégaux qui hantent les bas-fonds pour justifier les intenses campagnes de stérilisation – on appelle ça la vaccination. On instille aussi la peur du cyborg et des prothèses cybernétiques via des images où celles-ci sont utilisées pour la violence. La violence, sous n’importe quelle forme, est un comportement abhorré dans cette société conformiste et qui se veut bien-pensante et surtout, en paix. Les seuls autorisés à en faire preuve, ce sont les envoyés des autorités : les forces de l’ordre, l’armée et la légion des spectres. Et c’est pour ça qu’on les craint.
La dernière révolution permise par cette crainte presque maladive de la violence, c’est la pilule de sérénité, en vente sans ordonnance. Les violences domestiques étaient les plus complexes à éliminer. Voilà chose faite grâce au progrès de l’industrie pharmaceutique ! Cette pilule magique inhibe les comportements agressifs et empêche tout désir sexuel. Personne n’a rien contre la sexualité, après tout chaque individu est libre. Mais pas quand c’est lié à des scandales. Ou quand on devient l’ami ou la connaissance d’un type ou d’une femme condamné(e) pour violence conjugale.
Le meilleur moyen mis en œuvre pour garantir la stabilité a justement été basé sur le « qu’en dira-t-on ». Chaque citoyen pouvant être noté par les autres, et servant aux autorités pour établir sinon des statistiques, des impôts personnalisés, le civisme n’a pas manqué de revenir dans les mœurs. Les personnes de mauvaise réputation ne sont certes pas privées de certains droits – liberté absolue oblige ! – elle est cependant contrainte à des malus économiques. Quand ça touche au porte-monnaie, ça fait mal et personne ne cherche à renverser le régime, car ce serait mal vu et impoli.